Page:Urfé - L’Astrée, Seconde partie, 1630.djvu/453

Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’homme qui vive, pour vous avoir donné tant de sujets de hayne. Mais s’il vous plait d’ouyr ce que je viens vous declarer, peut-estre ne me jugerez-vous point tant coulpable que vous faites maintenant.

Et parce que je luy respondis avec beaucoup d’aigreur, et que je ne voulois luy donner loisir de parler, ma nourrice m’en reprit, me disant que je devois l’escouter, parce que s’il n’avoit failly, il n’estoit raisonnable de le traitter de cette sorte, et que s’il avoit fait faute, je le pourrois avec plus de raison bannir de ma presence apres l’avoir ouy. – Et bien, luy dis-je, que pensez-vous qu’il vueille alleguer ? Je le sçay aussi bien que luy. Il dira que l’affection qu’il m’a portée le luy a fait faire, mais qu’ay-je affaire de cette affection, si elle m’est dommageable ? – Je n’accuseray pas, me dit-il, madame, seulement cette affection dont vous parlez, encores peut-estre qu’envers quelque autre, cette excuse rie seroit pas trouvée si mauvaise que vous la dites, mais je vous diray de plus, que jamais personne ne fut plus finement trompée que vous et moy l’avons estez par Leriane.

Et sur cela, il reprit toute l’histoire que je viens de vous faire, de quelle sorte elle luy donna couiage de me regarder, de parler à moy, d’aspirer à mes bonnes graces, les faveurs controuvées qu’elle luy portoit de ma part, les inventions contre Damon, les rapports que par son moyen elle me faisoit faire