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belles dames il y avoit plusieurs chevaliers et enfans des druides, qui s’estoient mis parmy elles, pour leur tenir compagnie, et passer le soir plus agreablement.

Ce fut en ce lieu où la premiere fois je vis Teombre. Cest homme avoit presque passé son automne avec une si bonne opinion de luy mesme qu’il pensoit que toutes les dames mourussent d’amour pour luy. Quant à moy, je ne peus jamais y remarquer chose qui me pleust ; toutesfois il est certain qu’il avoit des- mignar­dises qui ne des plaisoient point à quelques unes.

Entre les autres, Florice, à ce que je crois, l’avoit aymé : cette Florice à la verité est oit belle, et pouvoit conserver ce nom entre celles qui sont estimées belles. Elle estoit blanche et blonde, avoit tous les traicts de visage tres-beaux, mais sur tout les yeux si doux et attrayants, que j’advoue n’en avoir jamais veu de semblables. Elle avoit la taille si belle, et la façon si pleine de majesté, qu’on pouvoit aisément juger qu’elle n’es toit pas née parmy le peuple ; aussi estoit-elle de cette race qui se vante d’estre issue du grand Arioviste.

Et quoy que cette belle dame fust telle, qu’il n’y eust point en toute la contrée qui peut-estre ne luy deust céder, et en merite, et en beauté ; si est-ce que Teombre, fust pour le malheur d’elle ou autrement, en estoit plus aimé qu’autre qui fust dans la ville. Et parce qu’il y avoit desja quelque