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ce temps. Et quoy que cela rapporta peu à son dessein, si ne luy fut-il du tout inutile, car il commença d’accoustumer sa bergere à semblables discours, qui peut-estre n’est pas un des moindres artifices dont un amant avisé se doive servir, d’autant que la coustume nous rend les choses aisées, qui du commencement nous estonnent, et que nous jugeons presque impossibles. Diane oyant ces paroles, encore qu’elle jugea bien qu’elles estoyent veritables, si ne fit-elle semblant de les croire, mais continuant comme elle avoit commencé : Et cecy, dit-elle, berger, me fortifie encore plus en l’opinion que j’ay conceue de vous, et pour vous tesmoigner que je dis vray, regardez avec quelle froideur je vous escoute et vous respons ; car si j’avois autre creance de vos paroles, soyez certain que le premier mot que vous m’en avez dit, eust esté le dernier que j’eusse escouté. Silvandre vouloit respondre, mais il en fut empesché par une rencontre qu’ils firent. Astrée et Tircis alloient les premiers, Philli et Hylas apres, puis Madonte et Tersandre, et en fin Diane, et Silvandre, et apres eux la malicieuse Laonice. Suivant de cette sorte le sentier que Silvandre leur avoit monstré, ils approcherent sans faire beaucoup de bruit d’un fort agreable bocage, qui estoit sur leur chemin.

Et parce que les discours d’Astrée et Tircis n’estoient pas