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d’Amarillis, et qu’elle luy conseilla de laisser la vie champestre où il avoit esté nourry, parce qu’elle la méprisoit comme indigne d’un noble courage, luy promettant qu’il n’y avoit rien d’assez fort pour la divertir de sa resolution. Apres qu’ils furent separez, Alcippe grava tels vers sur un arbre, le long du bois:


Sonnet d’Alcippe


Sur la constance de son amitié.

Amarillis toute pleine de grace
Alloit ces bors de ces fleurs despouillant,
Mais sous la main qui les alloit cueillant,
D’autres soudain renaissoient en leur place.

Ces beaux cheveux, où l’Amour s’entrelasse,
Amour alloit d’un dux air esveillant,
Et s’il en voit quelqu’un s’esparpillant,
Tout curieux soudain il le ramasse.

Telle Lignon pour la voir s’arresta,
Et pour miroir ses eaux luy presenta,
Et puis luy dit : Une si belle image

A ton départ mon onde esloignera ;
Mais de mon coeur jamais ne partira
Le traict fatal, nymphe, de ton visage.

Lors qu’elle fut partie, et qu’il commença à bon escient de ressentir les déplaisirs de son absence, allant bien souvent sur le mesme lieu où il avoit pris congé de sa bergere, il y soupira plusieurs fois tels vers.


Sonnet


Sur l’Absence.

Riviere de Lignon, dont la course éternelle
Du gracieux FORETS va le sein arrousant,
Et qui flot dessus flot ne te vas reposant,
Que tu ne sois r’entrée en l’onde paternelle,

Ne vois-tu point Allier, qui ravissant ta belle,
Use comme outrageux