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la voix, elle fut contrainte de se taire , mais avec tant de demonstrations de desplaisir, que Clidaman en fut esmeu et pour la consoler luy dit: Vous ne devez point, courageuse Melandre, vous perdre tellement de courage que vous ne mainteniez la generosité en cest accident, que vous avez fait paroistre en tous les autres. Le Dieu qui vous a conservée en de si grands perils ne veut pas vous abandonner en ceux-cy qui sont moindres. Vous devet croire que tout ce qui despendra de moy sera tousjours disposé à vostre contentement. Mais parce que je suis sous un prince à qui ne ne veux point desplaire, il faut que vostre liberté vienne de luy ; bien vous promets-je d’y rapporter de mon costé tout ce que vous pourriez esperer d’un bon amy. Et la laissant avec ses bonnes paroles, il alla troever Childeric et le supplia d’obtenir du roy Maroüé la liberté de ce jeune prisonnier.Le jeune prince qui aymoit mon fils, et qui sçavoit bien que le roy son pere seroit bien aise d’obliger Clidaman. Sans retarder d’avantage.l’alla demander à Meroüe qui accorda tout ce que mon fils demandoit. Et parce que le temps estoit si court que la moindre partie qu’il en eust perdue eust fait faute à Melandre, il l’alla troever en son logis òu l’yant tirée à part : Chevalier Triste, luy dit-il faut que vous changiez de nom, car si vos infortunes vous ont ca devant donné sujet de le porter, il semble que vous le perdez bien tost. Le Ciel commence de vous regarder d’un oeil plus doux que de coustume. Et tout ainsi qu’un mal-heur ne vient jamais seul, de mesme le bon-heur marche tousjours accompagné. Et pour tesmoignage de ce que je vous dis, sçachez chevalier (car tel vous veux-je nommer puis que vostre generosité à von droit vous en acquiert l’honorable tiltre) que desormais vous estes