de Lindamor, qui fut en fin de s’en revenir en toute diligence sans ce que nul sujet le peust arrester; autrement, qu’il deseperast de toute chose. Et le lendemain que Fleurial revint, apres luy avoir donné sa lettre, elle luy dit: Voy-tu, Fleurial, c’est à ce coup qu’il faut que tu fasses paroistre par ta diligence l’amitié que tu portes à Lindamor, car le retardement ne peut luy rapporter rien de moins que la mort. Va donc, ou plustost vole, et luy dis qu’il revienne encore plus promptement, et qu’à son retour il aille droit chez Adamas, parce que je le luy ay entierement acquis, et qu’estant icy, il sçaura la plus remarquable trahison d’amour qui ait jamais esté inventée, mais qu’il vienne sans qu’on le sçache, s’il est possible.
Ainsi partit Fleurial, si desireux de servir Lindamor, qu’il ne voulut pas mesme retourner en la maison de sa tante, pour ne perdre ce peu de temps, et pour n’avoir occasion d’y envoyer celuy que Lindamor avoit despeché, voulant luy-mesme luy faire ce bon service.
Ainsi s’escoulerent trois ou quatre jours, durant lesquels Celadon se remit de sorte qu’il ne ressentoit presque plus de mal, et desja commençoit de trouver long le retour du druide, pour l’esperance qu’il avoit de sortir de ce lieu. Et pour abreger les jours trop longs, il s’alloit quelquefois promener dans le jardin, et d’autres dans le grand bois de haute fustaye, mais non jamais sans y estre accom- pagné de l’une des nymphes, et bien souvent de toutes trois. L’humeur de Silvie estoit celle qui luy plaisoit le plus, comme sympathisant d’avantage avec la sienne; c’est pourquoy il la recherchoit le plus qu’il pouvoit.
Il advint qu’un jour, estans tous quatre au promenoir. ils passerent devant la grotte de Damon, et de Fortune, et parce que l’entrée sembloit belle et faicte aves un