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point ma mort sur ceste belle dame, qui en l’erreur de me prendre pour un plus heureux que je ne suis, me conduit à cette sorte de mort.

Et à ce mot, il beut tout ce qui estoit dans la couppe, qui estoit contre la coustume, parce que le mary n’en beuvoit que la moitié, et la femme le reste. Elle dit en sousriant: Et quoy, amy Lydias, il semble que vous ayez oublié la coustume? vous m’en deviez laisser ma part. – Dieu ne le permette, dit-il, sage Amerine; car c’est du poison que j’ay esleu plustost pour finir ma vie, que manquer à ce que je vous ay promis, et à l’affection aussi que je dois à la belle Silvie. – O dieux, dit-elle, est-il possible ?

Et lors, croyant que ce fust vrayement son Lydias, mais qu’il eust changé de volonté durant son abscense, ne voulant vivre sans luy, courut la tasse en la main, où estoit celuy qui avoit le vin mixtionné, car le jour auparavant, Ligdamon l’avoit fait faire à un apothicaire. Et avant que l’on sceust ce que mon maistre avoit dit et quelque deffense qu’il en sceult faire, parce que c’estoit la coustume, on luy en donna la pleine tasse, qu’elle beut promptement. Et puis revenant le trouver, elle luy dit: Eh bien, cruel et ingrat, tu as plustost aimé la mort que moy, et moy, je l’aime mieux aussi que ton refus. Mais si ce Dieux, qui jusques icy a conduit nos affections, ne me venge d’une ame si parjure en l’autre vie, je croiray qu’il n’a point d’oreille pour ouyr les faux sermens, ny point de force pour les punir.

Alors chacun s’approcha pour ouyr ces reproches, et ce fut en mesme temps que Ligdamen luy respondit: Discrete Amerine, j’advoue que j’aurois offensé, si j’estois celuy que vous pensez que je sois. Mais croyez moy qui suis sur la fin mon dernier jour, je ne suis point Lydias, je suis Ligdamon; et en quelque erreur que l’on puisse estre de moy à ceste