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le chemin de la prison, quoy que Ligdamon sceust dire, deceus comme les autres, de la ressemblance de Lydias.

Ainsi le voila au plus grand danger où jamais autre peut estre pour n’avoir point failly, mais ce ne fut rien au prix du lendemain qu’il fut interrogé sur les poincts, dont il estoit fant ignorant qu’il ne sçavoit que leur dire. Toutesfois, ils ne laisserent de ratifier le premier jugement, et ne luy donnerent autre terme que celuy de la guerison de ses playes. Le bruit incontinent courut par toute la ville que Lydias est prisonnier, et qu’il a esté condamné, non point à mourir comme meurtrier seulement, mais comme rebelle, ayant esté pris avec les armes en la main contre les Francs, qu’à ceste occasion on le mettroit dans la cage des lions. Et cela estoit vray que leur coustume de tout temps estoit telle, mais on ne luy avoit voulu prononcer cest arrest, afin qu’il ne se fist mourir.

Toutesfois on ne parloit d’autre chose dans la ville, et la voix en fut tellement espandue, qu’elle en vint jusques à mes aureilles, dont espouvanté je me desguisay de sorte, avec l’aide de ceste bonne dame qui l’avoit racheté, que je vins à Pans trouver Meroüé, et Clidaman ausquels je fis entendre ceste accident, dont ils furent fort estonnez, leur semblant presque impossible que deux personnes se ressemblassent si fort qu’il n’y eust point de difference. Et pour y remedier, ils y envoyerent promptement deux heraults d’armes pour faire sçavoir aux ennemis l’erreur en quoy ils estoient, mais cela ne fut que le leur persuader d’avantage, et leur faire haster l’execution de leur jugement.

Les playes de Ligdamon estoient des-ja presque gueries, de sorte que pour ne luy donner plus de loisir, ils luy prononcerent la sentence : Qu’attaint de meurtre et de rebellion, la justice