ne luy en veux point faire d’autre que le silence. – Et que pensez-vous, dit-elle, qu’il devienne, lors que celuy qu’il a envoyé icy retournera sans lettres ? Il deviendra, dit Galathée, ce qu’il pourra, car pour moy je suis toute resolue que ny sa resolution, ny celle de tout autre ne seront jamais cause que je vueille me rendre miserable. – Il n’est donc point necessaire, respondit Leonide, que Fleurial revienne ? Nullement, dit-elle.
Leonide alors luy dit froidement qu’il y avoit là un jeune homme qui vouloit parler à Silvie et qu’elle croyoit que c’estoit de la part de Ligdamon et qu’il n’avoit point voulu dire son message qu’à Silvie mesme. – Il faut, respondit la nymphe, que nous le mettions où elle est. Nous en serons quittes pour faire tirer les rideaux du lict où est Celadon, car je m’asseure qu’il sera bien aise d’ouyr ce que Ligdamon escrit, puis qu’il me semble que vous luy avez desja raconté toutes leurs amours. – Il est vray, respondit Leonide, mais Silvie est si desdaigneuse et altiere que sans doute elle s’offensera si ce messager luy parle et mesme devant Celadon. Il faut, dit-elle, la surprendre. Allez seulement devant dire au berger qu’il ne parle point, et tirez les rideaux, et je l’y conduiray.
Ainsi sortirent ces nymphes, et Galathée recognoissant ce jeune homme pour l’avoir veu bien souvent avec Ligdamon, luy demanda d’où il venoit, et quelles nouvelles il apportoit de son maistre. Je viens, madame, dit-il, de l’armée de Meroüé, et quant aux nouvelles de mon maistre, je ne les puis dire qu’à Silvie. – Vrayement, dit la nymphe, vous estes bien secret, et croyez-vous que je vueille permettre que vous disiez quelque chose à mes nymphes que je ne sçache point ? – Madame, dit-il, ce sera devant vous, s’il vous plaist, car j’en ay ce commandement, et principalement devant Leonide. –