du monde qui l’allast querir, parce qu’il ne croiroit jamais ceste bonne volonté de luy, à qui il n’en avoit point donné d’occasion, si eue luy estoit asseurée par quelqu’autre. Au contraire se figureroit que ce seroit un artifice pour le faire revenir.
Ergaste qui vouloit en toute sorte parachever la bonne œuvre qu’il avoit commencée, resolut de partir dés le lendemain avec Diamis, frere de Celion, luy promettant de ne point revenir sans le luy r’amener.
Estans donc partis en ce dessein, apres avoir sacrifié à Thautates pour le prier qu’il addressast leurs pas du costé où ils devoient trouver Celion, ils prindrent le chemin qui le premier se presenta à eux. Mais ils eussent cherché longuement en vain avant que d’en avoir des nouvelles, si luy-mesme transporté de fureur, ne se fust resolu de revenir en Forests, afin de tuer Ergaste, et puis du mesme glaive se percer le coeur devant Bellinde, ne pouvant vivre et sçavoir que quelqu’autre jouist de son bien.
En ceste rage il se remit en chemin, et parce qu’il ne se nourrissoit que des herbes et des fruits qu’il trouvoit le long des chemins, il estoit tant affoibly, qu’à peine pouvoit-il marcher, et n’eust esté la rage qui le portoit, il ne l’eust peu faire ; encor falloit-il que plusieurs fois du jour il se reposast, mesme lors que le sommeil le pressoit.
Il advint que de ceste sorte lassé, il se mit sous quelques arbres qui faisoient un agreable ombrage à une fontaine, et là, apres avoir quelque temps repensé à ses déplaisirs, il s’endormit. La fortune qui se contentoit des ennuis qu’elle luy avoit donnez, adressa pour le rendre entierement heureux les pas d’Ergaste et de Diamis en ce mesme lieu, et par hazard Diamis marchoit le premier. Soudain qu’il le vid, il le recogneut, et tournant doucement en arriere, en vint advertir Ergaste, qui