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beau, si discret et si accompli qu’il ne luy deffaut nulle des perfections qui font aimer ; si cela est, il y a du danger, d’autant que les trahisions d’amour sont si difficiles à descouvrir, qu’il ny en a eu encor un seul qui l’ait peu faire. – Laissez m’en la peine, dit-elle, et voyez seulement ce que vous voulez que je fasse en cest affaire dont nous avons discouru. – Il me semble, dit le druide, qu’il faut que ceste guerre se fasse à l’oeil, et quand j’auray veu comme va le monde, nous disposerons des affaires au moins mal qu’il nous sera possible, et cependant tenons nostre dessein secret.

Là dessus Silvie le laissa reposer, et vint retrouver Galthée qui avec Leonide, estoit pres du lict de Celadon ; car ayant sceu qu’il estoit esveillé, elles n’avoient peu ny l’une ny l’autre retarder d’avantage de le voir. Les caresses qu’il fit à Leonide ne furent pas petites, car pour la courtoisie dont elle l’obligeoit, il l’amoit et estimoit beaucoup, quoy l’humeur de Silvie luy pleust d’avantage. Peu apres ils entrerent en discours d’Adamas, louant sa sagesse, sa prudence et sa bonté ; sur quoy Celadon s’enquit si ce n’estoit pas cestuy-cy qui estoit fils du grand Pelion, duquel il avoit ouy dire tant de merveilles. C’est luy mesme, respondit Galathée, qui est venu expres pour votre mal. – O madame, respondit le berger, qu’il seroit bon medecin, s’il le pouvoit guerir, mais j’ay opinion que quand il le cognoistra, il desesperera plustost de mon salut qu’on n’osera pas entreprendre la cure.

Galathée croyoit qu’il parlast du mal du corps. Mais, dit-elle, est-il possible que vous croyez d’estre encor malade ? Je m’asseure que si vous voulez vouy y aider, en deux jours vous sortirez du lict. – Peut-estre, madame, respondit Leonide, ne sera-t-il pas guery pour cela, car quelquefois nous portons le mal si