tel commandement, dit-elle, seroit une indiscretion, mais j’y employeray bien ma priere, et mesmes si vous avez quelque chose de nouveau. – Je le veux, respondit Polemas, et de plus je vous asseureray que ce que vous orrez, n’a esté fait que durant le sacrifice, cependant que estiez en oraison. – Et quoy, luy dis-je, ma compage est donc le sujet de ceste chanson ? – Ouy certes, me respondist-il, et j’en suis tesmoing. Et alors il commença de ceste sorte.
Stances d’une Dame en devotion.
Dans le temple sacré, les grands dieux adorait
Celle que tous les cœurs adorent d’ordinaire :
Elle, sans qui la grace au monde ne peut plaire,
Des yeux et de la voix, des graces requeroit.
Et bien qu’elle voulust ses beaux yeux desarmer,
Et laisser de sa voix les appas et les charmes,
Ses beaux yeux et sa voix avoyent de telles armes,
Qu’on ne pouvoit la voir ny l’ouyr sans l’aymer.
Si quelquefois ses yeux d’un sainct zele enflambez,
Vont mignardant le ciel, toute ame elle mignarde,
Et si demy fermez en bas elle regarde,
O que leurs mouvemens ont de traits desrobez !
Que si quelque souspir va du cœur s’esgarant,
Quand les douceurs du ciel en esprit elle espreuve,
O que cet air fuitif incontinent tetreuve
D’autres souspirs esmeus d’un esprit different !
O grand Dieu, disoit elle, ayez pitié de moy !
Et mon desir alors s’efforceoit de luy dire :
Ayez pitié de moy, qui la pité desire :
Les effects de pitié doit ressentir en soy.
Sois pere, disoit-elle, et non juge en courroux,
Puis que tu veux, ô Dieu, que pere l’on t’appelle.