fait tendre aupres de la porte de la ville.
Vous pouvez croire que cecy mit toute la Cour en divers discours, et mesmes qu’Amasis et Clidaman, qui aimoient fort Polemas, avoient beaucoup de regret de le voir en ce danger, toutesfois la promesse les liot à donner le camp. Quant à Polemas, il se preparoit comme plein de courage au combat, sans avoir cognoissance de son ennemy. Pour Galathée qui avoit desja presque oublié l’offense que Lindamor avoit receu de Polemas, outre qu’elle ne croyoit pas qu’il sceust que son mal vinst de là, elle ne pensa jamais à Lindamor, ny moy aussi qui le tenois à plus de cent lieues de nous. Et toutesfois c’estoit luy, qui ayant receu ma lettre, se resolut de s’en venger de ceste sorte, et ainsi incogneu, se vint presenter, comme je vous ay dit.
Mais pour abreger, car je ne suis pas trop bonne guerriere, et je pourrois bien, si je voulois particulariser ce combat, dire quelque chose de travers, apres un long combat, où l’un et l’autre estoit esgalement advantagé, et que tous deux estoient si chargez de playes que le plus sain devoit estre autant asseuré de la mort, que de la vie, les chevaux vindrent à leur manquer dessous, et eux au contraire aussi gaillards que s’ils n’eussent comabttu de tout le jour, recommencerent à verser leur sang, et r’ouvrir leurs blesseures, avec tant de cruauté que chacun avoit pitié de voir perdre deux personnes et telle valeur. Amasis, entre autres, dit à Clidaman, qu’il seroit à propos de les separer, et ils trouverent qu’il n’y avoit personne qui le peust mieux que Galathée.
Elle qui, de son costé, estoit desja bien fort touchée de pitié, et n’attendoit que ce commandement pour l’effectuer, de bon cœur avec trois ou quatre de nous vint au camp. Lors qu’elle y entra, la victoire panchait du costé de Lindamor, et Polemas estoit reduit à mauvais terme,