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Ciel que contre vous. – Quoy ? adjousta Galathée, sans nulle sorte d’exception, fust-ce en chose qui offensast Amasis ou Clidaman ? – Je ne m’enquiers point, dit alors Fleurial, qui j‘offenserois en vous servant, car c’est à vous seule à qui je suis, et quoy que madame me paye, c’est toutesfois de vous de qui ce bien-fait me vient, et puis quand cela ne seroit point, je vous ay tousjours eu tant d’affection, que dés vostre enfance, je me donnay du tout à vous. Mais, madame, à quoy servent ces paroles ? je ne seray jamais si heureux que d’en pouvoir rendre preuve.

Alors Galathée luy dit : Ecouste, Fleurial, si tu vis en ceste resolution, et que tu sois secret, tu seras le plus heureux homme de ta condition, et ce que j’ay fait pour toy par le passé, n’est rien au prix de ce que je feray. Mais vois-tu, sois secret, et te ressouviens que si tu ne l’és, outre que d‘amie que je te suis, je te seray mortelle ennemie, encor te dois-tu asseurer qu’il n’y va rien moins que de ta vie. Va trouver Lindamor, et fais tout ce qu’il te dira, et croy que je recognoistray mieux que tu ne sçaurois esperer, les services que tu me feras en cela et prends garde à n’avoir point de langue.

A ce mot, Galathée nous vint retrouver en riant, disoit que Fleurial et elle avoient long temps parlé d’amour. Mais disoit-elle, c’est d’amour de jardin, car ce sont des amours des simples. De son costé, Fleurial, apres avoir quelque temps tourné par le jardin, feignant de faire quelque chose, sortit dehors, bien en peine de cest affaire, car il n’estoit pas tant ignorant qu’il ne cogneust bien le danger où il se mettoit, fust envers Amasis s’il estoit descouvert, fust envers Galathée s’il ne faisoit ce qu‘elle luy avoit commandé, jugeant bien que c‘estoit amour, et il avoit ouy dire que toutes les offenses d’amour touchent au cœur. En fin l’amitié qu’il portoit à Galathée et le desir