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vous, ny d’autres raisons pour excuser ma hardiesse, que celles dont vous avez usé parlant à Diane. Et seulement j’adjousteray ceste consideration, afin que vous cognoissiez la grandeur de mon affection : Que si le coup qui ne se void, se doit juger selon la force du bras qui le donne, la beauté de Diane, dont vous ressentez la blessure, estant beaucoup moindre que la vostre, doit bien avoir fait moindre effort en vous que la vostre en moy. Et toutesfois, si vous l’aimez avec tant de violence, considerez comment Amidor doit estre traitté de Callirée, et quelle peut estre son affection, car il ne sçauroit la vous declarer que par la comparaison de la vostre. – Berger, luy respondit-il, si la cognoissance que vous avez eue de l’amitié que je porte à Diane, vous a donné la hardiesse de me parler de ceste sorte, il faut que je supporte le supplice que mon inconsideration merite, ayant parlé si ouvertement devant vous. Mais aussi deviez-vous avoir esgard, qu’estant fille, je ne pouvois par ces discours offenser son honnesteté, et si faites bien vous la mienne en me parlant ainis, qui ay un mary, qui ne supporteroit pas avec patience cest outrage, s’il en estoit adverty. Mais outre cela, puis que vous parlez de Diane, à qui veritablement je me suis entierement donnée, encor faut-il que je vous die, que si vous voulez que je mesure vostre affection à la mienne, selon les causes que nous avons d’aimer, je ne croiray pas que vous en ayez beaucoup, puis que ce que vous nommez beauté en moy ne peut, en sorte que ce soit, retenir ce nom aupres de la sienne. – Belle bergere, luy dit Amidor, je n’ay jamais creu que l’on vous peust offenser en vous aimant, mais puis que cela est, j’advoue que je merite chastiment, et que je suis prest à le recevoir tout tel que vous me l’ordonnerez. Il est vray que vous devez ensemble vous resoudre à joindre