inutilement, tant que vous servirez ceste belle bergere, non plus que le flambeau ne se consume pas en vain, qui esclaire à ceux qui sont dans la maison ; car tout le reste du monde n’estant que pour servir ceste belle, vous aurez fort bien employé vos jours, quand vous les aurez passes en son service. – Mais changeons de discours, dit Amidor, car voicy venir Filidas, qui ne prendroit nullement plaisir à les ouyr, encore que vous soyez fille. Et presque en mesme temps Filidas arriva, qui nous fit toutes lever pour le saluer. Mais Amidor, qui aimoit passionnément la fainte Callirée, lors que sa cousine arriva, prit le temps si à propos, que s’esloignant avec Filandre un peu de la trouppe, et la prenant sous le bras, et voyant que personne ne les pouvoit ouyr, commença de luy parler ainsi : Est-il possible, belle bergere, que les paroles que vous venez de tenir à Diane, soient veritables, ou bien si vous les avez dites seulement pour monstrer la beauté de vostre esprit ?– Croyez, Amidor, luy respondit-il, que je ne suis point mensongere, et que jamais je ne dis rien plus veritablement, que l’asseurance que je luy ay faite de mon affection ; que si en quelque chose j’ay manqué à la verité, ç’a esté pour en avoir dit moins que j’en ressens. Mais en cela je dois estre excusé, puis qu’il n’y a point d’assez bonnes paroles pour le pouvoir dire comme je le conçois. A quoy il respondit avec un grand soupir : Puis que cela est, belle Callirée, mal-aisément puis-je croire que vous ne recognoissiez beaucoup mieux l’affection que l’on vous porte, puis que vous ressentez les mesmes coups dont vous blessez, que non point celles qui en sont du tout ignorantes, et cela sera cause que je n’iray point recherchant d’autres paroles pour vous declarer ce que je souffre pour
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