Page:Urfé - L’Astrée, Première partie, 1631.djvu/241

Cette page n’a pas encore été corrigée

pour le respect qu’on portoit à l’habit, et à la qualité de druyde, à fin de le r’asseurer, il le fit asseoir aupres de luy, et puis luy parla ainsi : Mon enfant, car tel je vous puis nommer, pour l’amitié que j’ay tousjours portée à tous ceux de vostre famille, il ne faut que vous soyez marry d’avoir parlé si franchement à Stelle devant moy. Je suis tres-aise d’avoir sceu vostre prudence, mais je desirerois d’en sçavoir d’avantage, à fin de vous conseiller si bien en ceste affaire, que vous n’y fissiez point d’erreur, et pour moy je ne croy pas y avoir peu de difficulté, puis que les loix de la civilité et de la courtoisie obligent peut-estre d’avantage qu’on ne pense pas.

Aussi tost que Corilas avoit vei le druyde, il l’avoit bien recogneu, pour l’avoir veu plusieurs fois en divers sacrifices. Mais n’ayant jamais parlé à luy, il n’avoit la hardiesse de luy raconter par le menu ce qui s’esoit passé entre Stelle, et luy, quoy qu’il desirast fort que chacun sceust la justice de sa cause, et la perfidie de la bergere ; de quoy s’appercevant Adamas, afin de luy en donner courage, il luy fit entendre qu’il en sçavoit desja une partie, et que plusieurs le racontoient à son desavantage, ce qu’il oyoit avec déplaisir, pour l’amitié qu’il avoit tousjours portée aux siens. – Je crains, respondit Corilas, que ce ne vous soit importunité d’ouïr les particularitez de nos villages. – Tant s’en faut, repliqua-t’il, ce me sera beaucoup de satisfaction de sçavoir que vous n’avez point de tort, aussi bien veux-je passer icy une partie de la chaleur, et ce sera autant de temps employé.

Histoire de Stelle et Corilas

Puis que vous le commandez ainsi, dit le berger, il faut que je prenne ce discours d’un peu plus haut. Il y a fort long temps que Stelle demeura vefve d’un mary, que le Ciel luy avoit donné, plustost