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peut estre cachée. Il est homme plein de discretion, et jugement, je sçay qu’il a particuliere inclination à vous faire service : si vous l’employez en ceste occasion, je tiens pour certain que le tout reussira à vostre contentement.

Galathée demeura quelque temps sans respondre, mais Silvie qui voyoit que c’estoit le meilleur expedient et prevoyoit que par le moyen du sage Adamas, elle divertiroit Galathée de ceste honteuse vie, respondit assez promptement, que ceste voye luy sembloit la plus asseurée. A quoy Galathée consentit, n’en pouvant eslire une meilleure. Il reste, reprit Leonide, de sçavoir, madame, à fin que je n’outrepasse vostre commandement, que c’est que vous voulez que je die, ou que je taise à Adamas ? – Il n’y a rien, respondit Silvie, voyant que Galathée demeuroit interdite, qui oblige tant à se taire, que de fire paroistre une entiere fiance, ny rien au contraire qui dispense plus à parler que la meffiance recogneue. De sorte qu’il me semble pour rendre Adamas secret, qu’il luy faut dire, avant qu’il vienne, tout ce qu’il pourra descouvrir quand il sera icy. – Je suis, respondit Galathée, tant hors de moy, qu’à peine sçay-je ce que je dis. C’est pourquoy je remets toute chose à vostre discretion.

Ainsi partit Leonide avec dessein, quoy que la nuict fust au commencement fort obscure, de ne s’arrester qu’elle ne fust chez son oncle, de qui la demeure estoit sur le panchant de la montagne de Marcilly, assez pres des vestales et druydes de Laigneu. Mais son voyage fut beaucoup plus long qu’elle ne pensoit ; car arrivant sur la pointe du jour, elle sceut qu’il estoit allé à Feurs, et qu’il n’en reviendroit de deux, ou trois jours, qui fut cause que sans s’y arrester beaucoup, elle en prit le chemin, tant lasse toutesfois, que n’eust esté le desir de la guerison du berger, qui ne luy donnoit nul repos, sans doute elle eust