contrée, sous la charge de Ligdamon, afin qu’il fust tenu de Meroüée pour tel qu’il estoit. Entre autres Ligdamon, comme tres-gentil chevalier, n’y fut point oublié, mais ceste cruelle ne voulut jamais luy dire adieu, feignant de se trouver mal ; luy toutesfois, qui ne s’en vouloit point aller sans qu’elle le sceust en quelque sorte, m’escrivit tels vers.
Sur un depart
Amour, pourquoy, puis que tu veux
Que je brusle de tant de feux,
Faut-il que j’esloigne Madame?
Je luy respondis.
Pour faire en elle quelque effait,
Ne sçais-tu qu’en la cendre naist
Le Phœnix qui meurt en la flamme ?
Il eust esté trop heureux de ceste response ; mais ceste cruelle m’ayant trouvé que j’escrivois, et ne voulant, ny luy faire du bien, ny permettre qu’qutre luy en fist, me ravit la plume à toute force de la main, me disant que les flatteries que je faisois à Ligdamon, estoyent cause de la continuation de ses folies, et qu’il avoit plus à se plaindre de moy, que d’elle. Pour la fin elle luy escrivit.
Response de Silvie
Le Pœnix de la cendre sort,
Parce qu’en la flamme il est mort.
L’absence en l’amour est mortelle,
Si la presence n’a rien peu.
Jamais par le froid n’est rompu
Le glaçon qu’un feu ne degelle.
Vous pouvez penser avec quel contentement il partit. Il fut fort à propos pour luy d’avoir accoustumé