bien] vous pourrez le conduire au jardin, car pour aujourd’huy je me trouve un peu mal, et difficilement sortiray-je du lict, que sur le soir. Leonide toute triste ne luy respondit, sinon qu’elle rapporteroit tousjours tout ce qu’elle pourroit à son contentement.
Cependant qu’elles discouroient ainsi, Meril fit son message, et ayant trouvé le berger esveillé, luy donna le bon jour de la part de la nymphe, et luy presenta ses papiers. O combien promptement se releva-t’il sur le lict ! il fit ouvrir les rideaux, et les fenetres, n’ayant le loisir de se lever, tant il avoit de haste de voir e qui luy avoit cousté tant de regrets. Il ouvre le petit sac, et apres l’avoir baisé plusieurs fois : O secretaire, dit-il, de ma vie plus heureuse ! comment t’es-tu trouvé entre ces mains estrangeres ? A ce mot il sort toutes les lettres sur le lict, et pour voir s’il en manquoit quelqu’une, il les remit en leur rang, selon le temps qu’il les avoit receues, et voyant qu’il restoit un billet, il l’ouvre et leut tels mots :
Celadon, je veux que vous sçachiez que Galathée vous aime, et que le Ciel a permis le desdain d’Astrée, pour ne vouloir que plus long temps une bergere possedast ce qu’une nymphe desire. Recognoissez ce bonheur, et ne le refusez.
L’estonnement du berger fut tres-grand, toutesfois voyant que le petit Meril consideroit ses actions, il n’en voulut faire semblant. Les resserrant donc toutes ensemble, et se remettant au lict, il luy demanda qui les luy avoit baillées. Je les ay prises, dit-il, dans la toilette de madame, et n’eust esté que je desiroit de vous oster de la peine où je vous voyois, je n’eusse osé y aller ; car elle se trouve un peu mal. – Et qui est avec elle ? demanda Celadon. – Les deux nymphes, dit-il, que vous veites