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Heures devait éveiller dans l’esprit du spectateur. Mais rien n’autorise, dans le texte de Philostrate, à croire qu’elle ait été adoptée par l’artiste. À en juger par les habitudes de la peinture campanienne (qui d’ailleurs, comme nous l’avons dit, diffère à certains égards des tableaux de Philostrate), le paysage aurait été traité d’une manière sommaire ; une rose aurait peut-être représenté les jardins ; une vigne aurait tenu lieu d’un vignoble, un épi, d’un champ. Philostrate, en feignant de voir des champs et des bosquets, n’aurait fait que se prêter à une convention usitée dans l’art antique, il aurait compris le langage du peintre, et en présence du signe, il eût parlé comme s’il eût été en présence des objets que ce signe représentait. Tout cela est sans doute possible ; mais il est possible aussi, nous l’avons vu[1], que le paysage, au troisième siècle, eût reçu un développement qui le rapprochait de notre paysage moderne.



XXXV

Télèphe blessé[2].


Ce héros est le chef indomptable de la Teuthranie, c’est Télèphe qui naguère tenant tête aux Grecs, ensanglantait la terrible mêlée et remplissait de cadavres les eaux rougies du Caïque ; c’est le guerrier qui affrontait la lance d’Achille ; maintenant blessé à la cuisse, il couve un mal cruel ; le souffle semble l’abandonner, sa chair toute vive se consume et se tord convulsivement. Tant de souffrances ne rassurent point le cœur tremblant des Achéens qui fuient pêle-mêle le rivage de Teuthras.



Commentaire.


Séduite par Héraclès, Augé, la fille de Cépheus roi de Tégée, avait donné le jour à Télèphe. Cépheus la condamna à périr dans la mer, mais elle dut la vie à la compassion de Nauplios chargé d’exécuter la sentence. Elle se réfugia auprès de Teuthras, roi de Mysie, qui l’épousa. Nourri par une biche, sur le mont Parthénios, élevé au milieu des bergers, Télèphe, dès qu’il fut grand, se mit à la recherche de sa mère, et l’ayant trouvée, devint le fils adoptif et l’héritier de Teuthras. Il était roi de Mysie, quand les Grecs réunis pour venger Ménélas, débarquèrent dans ce pays, et le ravagèrent, le prenant pour la Troade. Télèphe à la tête des Mysiens, marcha contre les envahisseurs ; il tua Thersandre, le fils de Polynice, blessa Patrocle, fut lui-même blessé par Achille. Les Grecs toutefois ne purent se rallier ; ils se rembarquèrent et retournèrent en Grèce, après différentes épreuves. Télèphe ne pouvait êlre guéri

  1. Voir l’Introduct., p. 117 et suiv.
  2. Comme Philostrate l’Ancien avait composé, suivant Suidas, un livre d’épigrammes, on a dû lui attribuer cette épigramme sur Télèphe dont l’auteur, mentionné par l’Anthologie de Planude, est un Philostrate.