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En résumé, les tableaux décrits par Philostrate, ont leurs pendants plus ou moins analogues pour le sujet, comme pour la composition, dans les œuvres d’art antiques qui sont parvenues jusqu’à nous et, en particulier, dans les peintures campaniennes. La différence des temps suffit amplement pour expliquer les différences entre ces dernières et les peintures de la galerie napolitaine. Philostrate sent les choses de l’art, et en parle, à peu près comme tous les anciens ; il manque de principes, il n’assigne pas aux différentes parties de l’art, invention, composition, expression, exécution, ni leur véritable valeur relative, ni même toujours la même valeur ; en sa qualité de sophiste et d’amateur, il tient quelquefois plus de compte à l’artiste d’une pensée ingénieuse que d’un accord parfait entre tous les éléments d’un tableau ; toutefois, en général, il veut que les personnages paraissent animés ; la vérité et la vie, voilà, à ses yeux, les véritables mérites d’une peinture. Aussi se prête-t-il complaisamment à l’illusion, et cherche-t-il à communiquer au spectateur celle qu’il éprouve ou qu’il feint d’éprouver. Bien plus, convaincu comme tous les rhéteurs que la parole est le premier des arts, qu’elle ne le cède en rien à la peinture, même dans l’art de peindre, il décrit d’imagination les scènes qui précèdent ou suivent le moment choisi par l’artiste, et pour mieux favoriser l’illusion, il s’étudie à ne paraître décrire que ce qu’il voit. À sa description il conserve soigneusement le caractère de la parole improvisée ; et comme elle est composée pour des enfants, il omet bien des détails descriptifs que l’érudition moderne serait heureuse d’y trouver, qu’elle lui sait quelquefois mauvais gré de ne pas rencontrer, comme s’il avait voulu lui préparer une déception, et s’égare quelquefois en des digressions qu’il croit instructives et qui nous paraissent erronées. Il compose son langage de toutes les fleurs de l’antiquité poétique, mais dissimule l’effort de mémoire et d’assemblage à force de rapidité et de souplesse. Décrivant un tableau qui représentait les Heures, « il me semble, dit-il, que le peintre rencontra les