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UN ÉTÉ À LA CAMPAGNE


Mon disciple attendait, et ses regards avides,
Curieux, sur les miens obstinément fixés,
Semblaient m’interroger ; ils me disaient assez
Qu’il était mécontent. « Hé ! je comptais, mon maître,
Sur un joli cheval… je ne vois rien paraître,
Dit-il avec dépit. — Dès demain tu l’auras,
Lui dis-je, le serrant tendrement dans mes bras ;
Je n’en ai pas trouvé qui méritât la peine
D’être monté par toi. — C’est bon, la nuit prochaine,
Je t’engage à venir déranger mon repos,
Et tu verras ! » dit-il en me tournant le dos.

Je m’éloignai confus. Malgré cette menace,
Lorsque revint la nuit, rappelant mon audace,
Je gagnai doucement son lit ; là, j’eus recours,
Espérant le fléchir, aux plus tendres discours,
Assez bas murmurés toutefois, car mon hôte
Tout près de là couchait. Je convins de ma faute,
Humblement, en pleurant ; mais j’eus beau lui jurer
Que je n’épargnerais rien pour la réparer,
Je ne pus parvenir à calmer sa colère :
« Dors, dors, répondit-il, ou j’éveille mon père ! »

Je ne cacherai point que grande était ma peur ;
Cependant le péril stimulant mon ardeur,
Je risquai la bataille, et ma persévérance
Aisément triompha de cette résistance,