Page:Twain - Un pari de milliardaires, et autres nouvelles.djvu/231

Cette page a été validée par deux contributeurs.

eux se trouvait un incorrigible menteur que personne n’était arrivé à guérir de son défaut. Aussi l’avait-on laissé complètement à l’écart et personne ne voulait-il lui tenir compagnie. Depuis, j’ai souvent revu en imagination sa silhouette dans sa pose abandonnée, appuyé au bastingage de l’arrière ; et je me suis demandé si, en nous montrant plus persévérants dans nos efforts, nous ne serions pas arrivés à le guérir de son défaut par persuasion. Malheureusement, ce garçon était tellement vicieux qu’il nous paraissait à tous incorrigible.

— Pour ma part, j’ai conscience d’avoir fait tout mon possible pour le remettre dans le droit chemin.

Notre histoire eut un singulier épilogue. Le navire, immobilisé par le calme plat, n’avait pas bougé depuis quinze jours, quand se leva une belle brise qui éventa toute la mer. Aussitôt nous déployâmes nos blanches ailes pour prendre notre vol, mais le bateau ne bougea pas. Les voiles étaient gonflées à plein ventre, les cordages tendus à craquer et le navire n’avançait pas de l’épaisseur d’un cheveu. Le capitaine n’en revenait pas. Il nous fallut plusieurs heures pour découvrir la cause de ce phénomène que nous finîmes par attribuer aux anatifes. Ces animaux abondent dans cette région