Page:Twain - Un pari de milliardaires, et autres nouvelles.djvu/158

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

me voyant devenir un objet de risée et de compassion…

Oui ! J’étais marqué d’un vrai stigmate, d’une flétrissure indélébile ; c’était affreux pour moi de perdre tout droit à la considération de mes semblables !…

J’assurai d’un air dégagé que tout allait très bien, que ce n’était là qu’un de ces petits accidents qui arrivent à tout le monde.

Je produirais les bons tickets dans deux minutes, et nous aurions tout le temps de prendre le train. Cette aventure nous amuserait au moins pour tout le voyage. Je me fis délivrer des billets bien timbrés, bien en règle, et encore à temps, somme toute ; mais ne voilà-t-il pas qu’il me fut impossible de les retirer du guichet parce que, dans toute cette bousculade occasionnée par la recherche des deux personnes restées à la pension, j’avais oublié la banque et n’avais pas d’argent ! Pendant ce temps-là le train partit ; il ne restait plus qu’à rentrer à l’hôtel, c’est ce que nous fîmes, avec une certaine mélancolie et sans échanger beaucoup de paroles. J’essayai bien, pour rompre la glace, d’aborder quelques sujets généraux de conversation en m’étendant sur les beautés du paysage, les mystères de la transsubstantiation, et autres choses de ce genre,