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continent, les rapides ont le mauvais goût de partir parfois à la date annoncée. De tous les voyageurs mes clients restaient seuls dans la salle d’attente, tout le monde était déjà « monté dans le train », suivant l’expression du pays. Ils étaient au paroxysme de la nervosité et de l’affolement, mais je leur mis un peu de baume sur le cœur et nous nous dépêchâmes de passer sur le quai.

Là, nouvel accroc. Le contrôleur trouva à redire à nos billets. Il les examina soigneusement, sur toutes les faces, avec un air de soupçon, puis me regarda en dessous et appela un autre employé. Celui-ci en appela d’autres, et tous ensemble se mirent à discuter, à gesticuler et à ergoter ; je leur fis observer que le temps pressait et les invitai à nous laisser passer. Alors ils me dirent très poliment qu’il y avait quelque chose de louche dans ces billets et ils me demandèrent où je les avais pris.

Du coup, je devinai la cause de leur embarras. Vous vous souvenez que j’avais acheté ces tickets chez un marchand de cigares ; naturellement ils devaient sentir un peu le tabac. Alors, sans aucun doute, ils se demandaient s’il ne fallait pas les signaler à la douane et me faire payer des droits pour leur odeur. Je me décidai donc à user de fran-