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LES AVENTURES DE TOM SAWYER.

— Quoi, tu serais ce célèbre proscrit ? Guy de Gisborne connaît ta valeur, mais il est aussi brave que toi et n’a jamais reculé devant une menace. En garde !

Les deux antagonistes brandirent leurs sabres. Le duel débuta d’une façon très dramatique. Les adversaires imitaient les attitudes et les passes de deux marins qui s’étaient livré au cirque maint combat acharné. On reculait, on avançait à tour de rôle ; on rendait coup pour coup. Une, deux ! Une, deux ! Par degrés la lutte devint plus animée, bien que les sabres seuls fussent endommagés. Enfin, Tom s’écria d’une voix haletante :

— Tombe, tombe donc ! Pourquoi ne tombes-tu pas ?

— Je ne tomberai pas ! Tu as reçu plus de coups que moi.

— Cela ne fait rien. Tu sais bien que le livre dit : « Alors, d’un coup de revers, il tua l’infortuné Guy de Gisborne ».

Il n’y avait pas moyen de récuser un document historique de la valeur de celui que l’on venait d’invoquer ; Joe reçut donc son coup de sabre et tomba.

— Maintenant, dit-il en se relevant avec prestesse, c’est à mon tour de te tuer.

— Ah ! mais non. Les choses ne se passent pas ainsi dans le livre.

— Ça n’est pas juste.

— Eh bien, Joe, puisque te voilà mort, tu peux être le moine Tuck et m’assommer à coups de trique.

Joe accepta ce compromis, et son antagoniste passa un vilain quart d’heure. Enfin, Tom, qui pour rien au monde n’aurait renoncé au rôle du fameux proscrit, succomba dans une lutte contre douze archers représentés par Joe.

— Mes fidèles compagnons, dit-il alors à une bande de ses amis venue trop tard à son aide et toujours représentée par Joe Harper, donnez-moi mon arc, et là où tombera ma dernière flèche, vous enter-