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TRISTESSE DE TOM.

dos, tenant entre les mains sa pauvre fleur froissée. C’est ainsi qu’il mourrait, délaissé par le monde entier, sans abri au-dessus de sa tête, sans personne pour lui fermer les yeux, sans un visage ami penché au-dessus de lui. Et c’est ainsi qu’elle le verrait, le lendemain, lorsqu’elle ouvrirait sa croisée. Verserait-elle une larme sur son corps inanimé ? Paul avait déploré la fin prématurée de Virginie ; mais Virginie se serait peut-être consolée bien vite de la mort de Paul. Dans le doute, Tom se consola lui-même en songeant que sa tante du moins s’affligerait.

La fenêtre s’ouvrit tout à coup, la voix discordante d’une négresse profana le silence solennel, et un déluge d’eau inonda le martyr imaginaire.

Notre héros se redressa, éternua, se secoua ; un projectile fit siffler l’air ; on entendit un bruit de verre cassé, une forme indistincte sauta par-dessus l’enclos et disparut dans les ténèbres.

Une demi-heure plus tard, tandis que Tom, déjà déshabillé, contemplait, à la lueur d’une maigre chandelle, ses vêtements mouillés, Sid se réveilla ; mais si l’idée lui vint de faire quelque observation peu agréable, il changea d’avis et n’ouvrit pas la bouche, car son frère paraissait de mauvaise humeur. Ce dernier se coucha sans se donner la peine de faire sa prière, et Sid prit note de cette omission.