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LES RÉVÉLATIONS DE HUCK.

à claire-voie. Ils comptaient découvrir des traces de sang ; mais ils n’avaient trouvé qu’un grand sac…

— Un sac ! Qu’y avait-il dedans ?

Si ces mots eussent été autant d’éclairs, ils n’auraient pu s’échapper avec une rapidité plus soudaine des lèvres blêmies de Huck. La bouche béante, les yeux écarquillés, l’haleine suspendue, il attendit la réponse. Le Gallois, étonné, ouvrit à son tour de grands yeux, regarda Huck pendant cinq secondes, pendant dix secondes, puis répliqua :

— Des outils à l’usage des voleurs. Eh bien, qu’est-ce qui te prend ? Huck s’était rejeté en arrière, poussant un soupir de satisfaction. Son hôte fixa sur lui un regard scrutateur.

— Oui, des outils de voleur, répéta-t-il. Cela paraît te soulager beaucoup. Que croyais-tu donc que nous trouverions ? Huck semblait de plus en plus embarrassé. L’attention avec laquelle on le dévisageait le gênait. Il aurait tout donné pour imaginer une réponse plausible ; elle ne vint pas. La seule qui s’offrit à lui était insensée, mais il ne se donna pas le temps de la peser.

— Des livres pour l’école du dimanche, peut-être. Le vieillard partit d’un éclat de rire qui le secoua de la tête aux pieds.

— Mon pauvre Huck, tu bats la campagne, dit-il, lorsque son accès de gaieté se fut un peu calmé. Ça ne m’étonne pas. Tu es pâle et fatigué. Va te reposer ; le sommeil te remontera, je l’espère. Huck se reprocha d’avoir montré une agitation aussi absurde ; car, depuis qu’il avait entendu la conversation des deux bandits, il croyait que le paquet emporté de la taverne ne devait pas contenir le trésor. Il le croyait ; mais il n’en était pas sûr, de sorte que la nouvelle de la découverte du sac lui avait fait perdre son sang-froid. Il se consola en songeant qu’en somme les choses prenaient une bonne tournure. Le trésor ne pouvait être qu’au numéro deux ; Joe et son complice seraient