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LES AVENTURES DE TOM SAWYER.

sont pas morts, ces gredins. Vois-tu, nous savions juste où les trouver, grâce à toi. Nous nous sommes glissés jusqu’au bout du sentier qui, par bonheur, était très sombre. Je marchais en tête ; mais à quinze pas de l’endroit que tu nous as indiqué, il me vient une envie d’éternuer. J’ai essayé de retenir mon envie. Pas moyen ; il fallait que ça parte et c’est parti. Alors nous avons entendu un bruit de branches brisées. Je crie : feu ! Nous tirons tous, et comme nous étions prévenus, nos balles ont dû tomber au bon endroit. Malgré l’obscurité, les gueux avaient déguerpi et nous voilà courant après eux. Ils ont riposté par plusieurs coups de feu qui ont d’abord servi à nous guider. Enfin, il a fallu abandonner la chasse ; alors Owen est allé prévenir les constables qui ont fait bonne garde aux abords du fleuve. Le shérif s’est entendu avec mes fils pour organiser une battue dans le bois dès qu’il fera jour. Ce soir, la veuve pourra dormir tranquille. Le signalement de ces bandits nous aiderait beaucoup ; mais tu n’as sans doute pas pu voir à quoi ils ressemblent ?

— Oh si ! Je les ai rencontrés dans la ville et je les ai suivis.

— Bravo ! Décris-les.

— L’un est le vieil Espagnol sourd-muet qui est arrivé il n’y a pas longtemps, et l’autre est un grand escogriffe presque aussi mal habillé que moi…

— Ça suffit, Huck, nous les connaissons pour les avoir rencontrés près de la maison de la veuve. En route, garçons, et prévenez le shérif. Vous déjeunerez en revenant.

Les fils du Gallois se levèrent aussitôt ; au moment où ils se disposaient à quitter la salle, Huck s’élança vers eux en s’écriant :

— Je vous en supplie, ne dites pas que j’y suis pour quelque chose.

— Allons, on se taira, puisque tu le veux, Huck, répliqua le fermier. Tu devrais pourtant être fier de ta bonne action, au lieu de chercher à la cacher.