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LES AVENTURES DE TOM SAWYER.

C’était impossible ; mais les jeunes gens avaient souvent exploré la portion au-delà de laquelle on ne devait pas s’aventurer. Tom Sawyer y avait pénétré aussi loin que qui que ce fût.

La procession suivit ce long vestibule jusqu’à une distance de trois quarts de mille environ de l’entrée ; puis des groupes commencèrent à se glisser dans les galeries transversales, à courir le long des sombres corridors et à se surprendre aux endroits où les corridors se rejoignaient, Certains groupes parvinrent à s’éviter pendant plus d’une demi-heure sans dépasser les limites du terrain connu.

Enfin on regagna l’entrée de la grotte par bandes et par couples. La plupart des invités de Becky avaient les vêtements couverts de gouttes de suif ou mouillés par l’eau qui tombait des voûtes ; mais ils étaient ravis du succès du pique-nique. Ils furent étonnés de voir avec quelle rapidité le temps s’était écoulé et que la nuit approchait. Depuis une demi-heure la cloche du vapeur les rappelait à bord. Cette façon de terminer la journée ne leur causa aucune peine, tant s’en faut. Lorsque le petit navire se mit en marche avec ses jeunes passagers, le capitaine seul se plaignit du temps perdu.

Huck était déjà en faction quand les fanaux du vapeur passèrent devant le débarcadère. Il n’entendit aucun bruit à bord, car voyageurs et voyageuses tombaient de sommeil. Il se demanda quel bateau c’était et pourquoi il ne s’arrêtait pas devant le quai ; puis il n’y songea plus et s’occupa de ses affaires. Le ciel se couvrait de nuages et la nuit devenait sombre. Dix heures sonnèrent. Tout bruit de voiture cessa, les lumières s’éteignaient peu à peu, le dernier passant attardé disparut, la ville s’endormit, laissant le jeune veilleur seul avec le silence et les fantômes. À onze heures, on ferma la taverne et alors l’obscurité régna partout. Huck demeura en observation ; mais rien ne bougea. Le temps lui sembla long. Il se décourageait. Était-ce bien la peine d’attendre davantage ?