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LE RÊVE DE TOM.

une avance. Quand Becky arriva quelques minutes après, Tom eut l’air de ne pas la voir. Il s’éloigna pour rejoindre un groupe nombreux de garçons et de filles qui se pressa autour de lui. Becky se mit bientôt à poursuivre quelques-unes de ses camarades, éclatant de rire chaque fois qu’elle en atteignait une. Tom remarqua qu’elle faisait toujours ses prisonnières dans le voisinage du groupe en question et qu’elle s’arrêtait alors pour regarder du côté de l’ex-pirate. Ce manège, loin de le ramener à de meilleurs sentiments, ne servit qu’à stimuler sa vanité ; il fit tous ses efforts pour paraître ne pas se douter qu’elle était là. À la longue, Becky cessa de jouer ; elle erra seule dans la cour d’un pas irrésolu, soupirant et lançant des regards furtifs vers l’endroit où se tenait Tom. Il lui sembla que l’ingrat causait de préférence avec Amy Lawrence. Cette découverte l’indigna et elle voulut s’en aller, ce qui ne l’empêcha pas de se rapprocher du groupe ; puis elle dit, avec une vivacité affectée, à une écolière qui touchait presque Tom du coude :

— Ah ! te voilà, Jenny. Pourquoi n’es-tu pas venue à l’école du dimanche ?

— Mais j’y étais.

— Vraiment ? Où donc te trouvais-tu ?

— À la place où je me mets toujours. Tu sais bien que je suis dans la classe de miss Peters. Je t’ai même fait signe.

— C’est drôle, je ne t’ai pas vue. Je voulais te parler du pique-nique et je t’ai cherchée à la sortie.

— Un pique-nique, bravo ! Ta mère s’est enfin décidée ? J’espère que j’en serai.

— Certainement ; j’ai déjà dit à maman que je voulais t’avoir.

— Merci. Est-ce pour bientôt ?

— Après la distribution des prix.

— Alors tu pourras inviter toute l’école ?