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L’ORAGE.


XVII

L’ORAGE.


Vers minuit Joe se réveilla et appela ses compagnons. Un orage planait dans l’air. Nos pirates, pressés l’un contre l’autre, se tinrent immobiles et silencieux, attendant ils ne savaient quoi. En dehors de la lumière du foyer tout demeurait plongé dans une obscurité profonde. Bientôt une lueur, ou plutôt un frémissement de lueur, révéla vaguement le sommet du feuillage et s’évanouit pour se reproduire bientôt avec plus d’intensité. Un faible gémissement courut comme un soupir à travers le branchage ; une fraîche haleine caressa les joues de Tom, qui frissonna à l’idée que l’esprit de la nuit venait de le frôler. Au même instant un éclair transforma la nuit en jour, lui permit de distinguer chaque brin d’herbe et lui montra aussi deux visages effrayés. Un sourd roulement de tonnerre gronda et se perdit au loin. Une brise froide s’éleva, agitant les feuilles, secouant les cendres blanches autour du foyer. Un second éclair illumina la forêt, suivi d’un éclat de tonnerre beaucoup plus rapproché que le premier. Les enfants se cramponnèrent l’un à l’autre. Quelques grosses gouttes de pluie fouettèrent les feuilles avec un bruit de grêle.

— Vite, à la tente ! cria Tom.

Les voilà partis dans les ténèbres, trébuchant sur les racines, se butant contre les troncs d’arbres, s’enchevêtrant dans les vignes sauvages. Une rafale furieuse se mit à secouer les branches avec un sifflement sinistre. Les éclairs et les éclats de tonnerre se suivaient sans interruption. La pluie tombait maintenant à verse et l’ouragan dé-