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un instant perplexe et reprit sans trop de colère, assez haut toutefois pour que les meubles pussent l’entendre :

— Si je mets la main sur toi, je…

Elle n’acheva pas sa phrase. Elle venait de se courber et lançait sous le lit des coups de balai si formidables qu’elle avait besoin de son haleine pour ponctuer chaque effort. Par malheur, elle ne réussit qu’à épouvanter le chat.

— Il me semblait bien l’avoir vu entrer ici, le vaurien, murmura-t-elle.

Déposant le balai dans un coin, elle se dirigea vers le seuil de la porte ouverte d’où elle contempla les couches de tomates et les mauvaises herbes qui constituaient le jardin. Pas de Tom. Les mains allongées en guise de porte-voix, elle cria de nouveau à plusieurs reprises, de manière à être entendue au loin :

— Holà, Tom !

Au troisième appel, un léger bruit résonna derrière la vieille dame qui se retourna juste à temps pour saisir par le bas de sa jaquette un jeune garçon d’une dizaine d’années, à la mine éveillée, qu’elle arrêta dans sa fuite.

— Ah ! j’aurais dû penser à ce cabinet, s’écria-t-elle. Que faisais-tu là dedans, Tom ?

— Rien.

— Rien ? Regarde ta bouche.

— Je ne peux pas regarder ma bouche.

— Regarde tes mains alors. D’où vient ce barbouillage ?

— Je ne sais pas, ma tante.

— Ah ! vraiment ? En tout cas, tu sais ce que je t’ai promis si tu touchais encore à ces confitures. Avance ici.

Un rotin planait dans l’air. Le péril était imminent.

— Oh ! vois donc derrière toi, ma tante ! Est-ce que ça mord, ces bêtes-là ?