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rappelant les vertus, les mérites, les talents du jeune Roi.

« Dans Cheapside, à chaque auvent, à chaque fenêtre flottaient des bannières et des banderoles ; de riches tapis, des étoffes du plus haut prix, et notamment de drap d’or, tapissaient les rues, et laissaient soupçonner la fortune immense de ceux qui les habitaient, et la splendeur de ce passage était égalée par celle des autres rues, et souvent même dépassée. »

— Et toutes ces beautés et toutes ces merveilles, c’est à moi qu’elles s’adressent, murmurait Tom Canty.

Le faux roi était rouge de plaisir et d’enthousiasme, ses yeux flamboyaient, ses sens déliraient.

Il venait de lever la main pour prodiguer de nouvelles largesses, lorsqu’il aperçut un visage pâle, émacié, ébahi, dont les yeux se clouaient sur lui.

Il eut un tressaillement.

Ce visage était celui d’une femme qui se trouvait au premier rang des curieux.

Cette femme était sa mère.

Il porta la main à son front et se couvrit les yeux, comme s’il eût craint d’être aveuglé par la foudre.

Cette main laissait voir la paume en dehors.

La femme eut un cri, elle repoussa ceux qui lui barraient le passage, repoussa les gardes, s’élança vers Tom, saisit le cheval du Roi par la bride et l’arrêta.

— Ô mon enfant ! mon pauvre petit !… cria-t-elle.

Un officier de la garde royale la prit et l’entraîna, en l’accablant de malédictions, et d’une main vigoureuse il la rejeta dans la foule.