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peut-être, mais, au demeurant, la seule à laquelle il pût encore s’accrocher. Il se rappela ce que le vieil Andrews avait dit de la bonté du jeune Roi, de sa clémence, de sa pitié pour les malheureux. Pourquoi ne pas aller à lui, tenter de lui parler, implorer sa justice ?

Mais n’était-ce point là une illusion téméraire ? Comment un pauvre diable, sans feu ni lieu, pouvait-il espérer d’être admis en présence de l’auguste souverain du royaume ? Qu’importe ? Il n’en coûtait rien d’essayer. Dieu ferait le reste. Il y avait un abîme entre Miles Hendon et le Roi ; soit. Mais qui savait s’il ne se trouverait pas quelque jour un pont jeté sur cet abîme ! En attendant, il n’y avait qu’à aller de l’avant.

D’ailleurs Miles était un vieux routier. Il avait encore des tours dans son sac, et son esprit inventif ne pouvait manquer de le tirer d’affaire. Avant tout, il fallait gagner la capitale. Peut-être le vieil ami de son père, sir Humphrey Marlow, lui donnerait-il un coup de main ; le bon vieux sir Humphrey, premier gentilhomme de la cuisine du Roi, ou premier gentilhomme des écuries du Roi, ou quelque chose de ressemblant : Miles ne savait plus au juste quoi.

Toujours est-il que son activité retrouvait un aliment, que son énergie allait pouvoir s’exercer, qu’il avait devant lui un but défini. C’était assez pour chasser la pénible impression faite sur son esprit par l’incompréhensible conduite de lady Édith, pour lui faire oublier les humiliations et les tourments qu’il venait d’endurer, pour lui remonter le courage, lui faire lever la tête, et le déterminer à braver l’avenir en face.

En regardant autour de lui, il fut étonné d’avoir fait