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coups de poing et de bâton pour lui apprendre à vivre.

Le roi ne parvint point à fendre la foule qui l’avait séparé de son loyal ami et fidèle serviteur. Il fut obligé de le suivre de loin.

Le roi lui-même avait failli être condamné à recevoir la bastonnade pour avoir été trouvé en si mauvaise compagnie : mais on s’était contenté de l’admonester et de le sermonner, en considération de son jeune âge. Quand la foule eut enfin fait halte, il courut fiévreusement de place en place pour trouver une éclaircie et arriver jusqu’aux premiers rangs. Après de longs efforts, il y réussit.

Alors il vit une chose inouïe. Au milieu de la place, un homme était assis, le dos appuyé à un pilier de pierre, les pieds dans les ceps, en butte aux criailleries, aux ignobles imprécations d’un ramassis de misérables qui le regardaient à distance et qui lui jetaient des pierres et des immondices. Et cet homme était le favori du Roi d’Angleterre !

Édouard avait entendu la lecture de la sentence, mais il n’en avait compris ni la signification, ni la portée. Il respirait à peine, tant ce spectacle l’apitoyait. De grosses larmes sortaient une à une de ses yeux et descendaient le long de ses joues pâles comme la mort. Tout à coup il eut un cri déchirant quand il vit un œuf traverser l’espace, s’abattre et s’écraser sur le visage de Hendon, aux acclamations de la populace.

Le roi ne put supporter cet outrage qui lui semblait l’atteindre directement dans la personne de son ami. D’un bond il se trouva devant le pilori, et saisissant par la ceinture l’officier de justice qui était de garde :