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fait abroger plusieurs des lois cruelles qui opprimaient le peuple, et songe, dit-on, à introduire partout de grandes réformes…

Le roi ne pouvait en croire ses oreilles. Il s’était soudainement absorbé dans ses pensées et n’entendait plus un mot de ce que disait le vieillard. Ce « charmant petit garçon » était-il le petit mendiant avec qui il avait changé de costume avant de quitter le palais ? Cela n’était pas possible : l’enfant pauvre d’Offal Court, s’il avait eu l’audace de se faire passer pour le prince de Galles, avait dû se trahir au premier mot, au premier geste ; on l’avait, sans aucun doute, expulsé du palais, et on s’était mis à la recherche du vrai prince. Il n’était pas possible que la noblesse eût élu, à la place du fils de Henri VIII, quelque prince du sang, ou qu’à son défaut, on eût acclamé une autre dynastie que celle des Tudor. Le comte de Hertford s’y serait opposé et, tout puissant qu’il était, il aurait écrasé les rebelles.

Plus le roi s’abîmait dans ses conjectures, plus il se trouvait impuissant à résoudre ce mystère, plus aussi il devenait perplexe, agité, incapable de dormir, de manger. Son impatience d’aller à Londres croissait d’heure en heure, sa captivité lui paraissait d’instant en instant plus intolérable.

Vainement Miles Hendon mettait en œuvre toutes ses ressources pour calmer le trouble du roi ; le pauvre diable ne réussissait qu’à l’irriter davantage.

Deux femmes, enchaînées près de lui, eurent plus de succès. Elles lui parlèrent avec bonté, avec douceur, et lui enseignèrent à prendre patience. Il les remercia, les écouta et daigna leur demander pourquoi elles étaient en prison.

— Nous sommes catholiques, dirent-elles.