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poitrines partit un hourra : Vive le prince de Galles !

Les sentinelles présentèrent les armes en tenant devant eux leurs hallebardes ; les portes tournèrent sur leurs gonds. Le petit prince pour rire d’Offal Court s’élança, guenilles au vent, vers le vrai prince de Westminster et lui tendit la main.

— Tu as l’air harassé, affamé, avait dit Édouard Tudor. On t’a fait mal, viens avec moi.

Une demi-douzaine de gens de service s’étaient élancés, pour faire je ne sais quoi, mais évidemment pour se mêler de ce qui ne les regardait pas. Un geste vraiment royal les tint à distance, et ils s’arrêtèrent cloués sur place, comme autant de statues.

Édouard conduisit Tom dans un somptueux appartement, en lui disant que c’était là son cabinet de travail. Puis il commanda d’apporter un repas si copieux, que Tom n’en avait jamais vu de pareil, si ce n’est dans les livres.

Le prince, avec toute la délicatesse qui seyait à son rang et à son éducation, renvoya ses serviteurs, pour ne pas augmenter l’embarras de son humble convive, en l’exposant à leurs propos malicieux ; ensuite il s’assit tout près de lui et se mit à le questionner pendant que Tom mangeait.

— Comment t’appelles-tu, petit ?

— Tom Canty, pour vous servir, messire.

— Drôle de nom. Où demeures-tu ?

— Dans la Cité, messire. Dans Offal Court, au bout de Pudding Lane.

— Offal Court ! Drôle de nom aussi. As-tu des parents ?

— Des parents ? Oui, messire, j’ai mon père et ma mère ; et puis j’ai ma grand’mère, mais je ne