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serrée au cou et tombant jusqu’aux pieds.

— C’est un saint ermite, se dit le roi. Dieu soit béni.

L’ermite se leva.

Le roi frappa doucement à la porte. Une voix caverneuse répondit :

— Entrez, mais laissez le péché derrière vous, car le sol que vous foulez ici est sacré.

Le roi poussa la porte et s’arrêta sur le seuil.

L’ermite attacha sur lui deux grands yeux flamboyants, et dit :

— Qui es-tu ?

— Je suis le roi, repartit Édouard avec calme.

— Salut à toi, Roi ! cria l’ermite avec enthousiasme.

Puis, allant et venant avec une fiévreuse activité, tandis qu’il répétait : « Salut ! salut ! » il enleva ce qui se trouvait sur le banc, y fit asseoir le roi, le rapprocha du foyer, jeta quelques fagots sur le feu, et se mit à arpenter la pièce d’un pas nerveux.

— Salut ! Beaucoup ont cherché un asile dans ce sanctuaire : ils n’étaient pas dignes d’y entrer. Ils ont été expulsés. Mais un roi qui répudie sa couronne, qui renonce aux vaines splendeurs de sa cour, qui se couvre de haillons pour s’humilier devant le Seigneur, un roi qui consacre sa vie à la pratique de la piété, à la mortification de la chair, est le bienvenu dans cette sainte demeure ; qu’il y reste à jamais jusqu’à ce que la mort le délivre de l’amertume de la vie !

Le roi s’empressa de l’interrompre et de lui donner des explications. L’ermite ne l’écoutait pas et poursuivait son propre discours, d’une voix forte et imposante :

— Oui, tu goûteras ici la paix des sens, le repos