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Il alla plus loin, plus loin encore. Plus il avançait, plus la forêt semblait s’épaissir. De grandes ombres s’allongeaient au pied des arbres. La nuit approchait. Il eut peur d’avoir à la passer dans ce lieu désert. Il hâta le pas ; mais sa course ne faisait que le ralentir, car il ne choisissait pas les endroits où il posait les pieds et s’embarrassait dans les broussailles, culbutait par-dessus les grosses racines à fleur de terre ou se piquait aux orties.

Tout à coup il eut un cri de joie ; il venait d’entrevoir une lumière. Il s’en approcha prudemment, se baissant souvent pour mieux voir les alentours et écoutant. Il s’assura que la lumière venait d’une ouverture non vitrée pratiquée dans une hutte délabrée. Il entendit une voix rauque et voulut fuir et se cacher ; mais il changea soudain d’avis, car il lui parut que la voix priait. Il se glissa jusqu’à la fenêtre de la hutte, se dressa sur la pointe des pieds et jeta un regard furtif à l’intérieur.

La pièce était petite. Le sol durci par l’usage tenait lieu de parquet. Dans un coin se trouvait une natte de jonc qui semblait faire office de lit, à en juger par les deux vieilles couvertures jetées dessus ; tout auprès se voyaient un seau, une tasse, une cuvette, deux ou trois pots et poêlons ; il y avait aussi un petit banc et un escabeau ; dans l’âtre se consumaient les restes d’un feu de fagots.

Au pied d’une petite table, où brûlait une chandelle, était prosterné un homme âgé. Devant lui, sur une vieille boîte de bois, gisait un livre ouvert. Une tête de mort était posée sur le livre.

L’homme était grand et musculeux. Il avait les cheveux blancs, la barbe longue et blanche. Il portait une espèce de robe en peau d’agneau