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CHAPITRE XVIII.

LES VAGABONDS.


Il faisait à peine jour quand les vagabonds sortirent de la grange et se mirent en marche. Le ciel était couvert. On eût dit qu’il pesait sur les têtes. Le sol visqueux glissait sous les pieds ; l’air froid et pénétrant faisait frissonner. La gaieté de la veille avait disparu. Quelques-uns étaient sombres et silencieux ; d’autres nerveux et irritables. Personne n’avait envie de rire. Tous mouraient de soif.

L’Hérissé avait confié Jack à Hugo. Il avait donné à celui-ci quelques instructions brèves et sèches. Quant à John Canty, il lui avait commandé de se tenir à distance et de ne point s’occuper de l’enfant. Du reste, Hugo avait pour consigne de ne pas rudoyer le pauvre petit.

Cependant le temps devint plus doux, les nuages commencèrent à se dissiper. Dès qu’on cessa de grelotter, le courage se remonta. Petit à petit, les visages rayonnèrent. Bientôt les quolibets allèrent leur train. Malheur aux passants : les insultes et les injures pleuvaient sur eux. La pègre tenait le haut du chemin et n’entendait pas raillerie sur ses droits d’occupant. Elle voulait jouir largement de la vie en plein air. D’ailleurs, on s’empressait de lui faire