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— C’est la crainte qui te fait parler. Sois sincère, il ne te sera fait aucun mal. Fais venir un orage, dût-il être tout petit. Je ne demande pas une tempête, un ouragan, j’aime mieux le contraire ; fais ce que je te dis, et tu auras la vie sauve, et tu sortiras d’ici, avec ton enfant, sous la protection du Roi, sans qu’aucun des sujets de ce royaume puisse te causer aucun mal ni dommage.

La femme ne répondit pas. Elle s’était laissée tomber la face contre terre, et ses gémissements, entrecoupés de hoquets convulsifs, prouvaient qu’elle était impuissante à satisfaire le caprice royal, quoique la vie de son enfant et son propre salut fussent en jeu.

Tom insista, ordonna sévèrement, frappa du pied pour se faire obéir.

La femme sanglotait toujours.

— Je ne puis pas, sire, je ne puis pas.

À la fin, Tom dit gravement :

— Je crois que cette femme dit vrai. Si ma mère était à sa place, et si elle tenait quelque pouvoir du Malin, elle n’hésiterait pas un moment à faire éclater tous les orages qu’on voudrait et à mettre tout le pays sens dessus dessous, dût-il n’en point rester pierre sur pierre, dès lors qu’elle serait sûre de me sauver la vie à ce prix ! Or, j’ai lieu de croire que toutes les mères pensent comme la mienne. Tu es libre, bonne femme, et ton enfant aussi, car je vous crois toutes deux innocentes. Or, maintenant que tu n’as plus rien à craindre, que tu es pardonnée, tire tes bas et fais venir un orage, je te rendrai aussi riche que tu le voudras.

— Je ne puis pas, sire, dit la pauvresse, je ne puis pas.

Tom était rouge de colère. Les assistants frémis-