Page:Twain - Contes choisis.djvu/185

Cette page n’a pas encore été corrigée

ou deux, si elle avait pris un bon élan, et puis retomber sur ses pattes avec la dextérité d’un chat. Il l’avait dressée aussi dans l’art d’attraper les mouches, et il l’avait exercée si patiemment qu’elle clouait une mouche contre le mur du plus loin qu’elle la voyait. Smiley disait que tout ce qu’il fallait à une grenouille, c’était l’éducation, et que l’on pouvait en faire à peu près ce qu’on voulait, et je crois qu’il avait raison. Tenez, je l’ai vu poser Daniel Webster là sur le plancher — Daniel Webster, c’était le nom de la grenouille — et lui chanter : « Des mouches, Dan, des mouches ? » Et avant que vous eussiez cligné de l’œil, elle faisait un bond, happait une mouche, ici, sur le comptoir, et retombait sur le plancher comme un paquet de boue, et se mettait à se gratter la tête avec sa patte de derrière, d’un air aussi indifférent que si elle n’avait pas eu la moindre idée d’avoir fait autre chose que ce que toute autre grenouille pouvait faire. Vous n’avez jamais vu une grenouille aussi modeste et aussi franche, dressée comme elle l’était. Et quand il s’agissait de sauter à tout moment et tout simplement sur un terrain plat, elle franchissait plus d’espace en un saut qu’aucune bête de son espèce. Le saut en longueur était son triomphe. Dans ces cas-là, Smiley pontait son argent sur elle tant qu’il avait un rouge liard. Il était monstrueusement fier de sa grenouille, et il en avait le droit. Car des gens qui avaient voyagé et qui avaient été partout disaient qu’elle battrait toutes les grenouilles qu’ils avaient jamais vues.

« Très bien. Smiley gardait sa grenouille dans une petite boîte à treillis, et l’emportait parfois avec lui à la ville pour parier. Un jour, un individu, étranger à notre camp, le rencontre avec sa boîte et lui dit :