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IV. CONSTITUTION DES ATELIERS DE CHARITÉ[1].


On a borné les ateliers de charité aux parties de chemins dont la construction ne présente pas de grandes difficultés, et peut être exécutée par des travailleurs peu instruits, tels que sont les ouvriers de toute espèce, hommes, femmes et enfants, qui sont dans le cas de s’y présenter. Les parties qui demandent une plus grande capacité ont été adjugées par entreprise à prix d’argent, et au rabais, comme le sont ordinairement tous les chemins à construire dans la généralité de Limoges, depuis que les corvées y sont abolies. Alors, c’est à l’entrepreneur à choisir, instruire, payer et surveiller ses ouvriers, de manière que son chemin soit bon et recevable.

Mais, quand le public est obligé d’être lui-même entrepreneur pour la distribution des charités consacrées à des travaux utiles, on ne peut les choisir d’une espèce trop aisée, afin d’éviter les négligences et les malfaçons, si faciles à introduire dans un ouvrage public qui serait un peu compliqué.

Dans des ateliers composés de plusieurs centaines de travailleurs, il deviendrait impossible de distribuer chaque jour une tâche à chacun. Cette opération trop longue consumerait un temps précieux. Il faut donc, pour abréger, distribuer l’ouvrage en tâches qui puissent occuper plusieurs ouvriers pendant plusieurs jours, et réunir ainsi plusieurs travailleurs sur une même tâche. Mais, pour éviter dans ces réunions les jalousies et les disputes, que l’inégalité des forces et l’inégalité de l’assiduité au travail pourraient occasionner, on donne chaque tâche à une famille entière, qui a l’intérêt commun de faire le plus d’ouvrage possible pour la subsistance commune, et dans laquelle le père occupe chacun selon ses forces, et surveille et contient chacun de ses coopérateurs mieux que le piqueur le plus vigilant.

  1. Les instructions de Turgot relatives à la formation des ateliers de charité dans la généralité de Limoges ont été perdues. Dupont de Nemours les a remplacées par les détails qu’on va lire, et qui sont extraits des Éphémérides du citoyen, sixième année, tome II. Mais ce qui rend cette perte moins regrettable, c’est que, selon toute apparence, ces instructions se trouvent reproduites dans celle du 2 mai 1775, pour l’établissement et la régie des ateliers de charité dans les campagnes. — Voyez, tome II, Actes du ministère de Turgot. (E. D.)