matière de l’étranger, en était l’entrepôt naturel, et l’on avait profité de cette circonstance pour y lever des droits assez forts sur cette marchandise. Mais ce qui est vraiment incompréhensible, est que la ville de Lyon avait obtenu que toutes les soies qui viendraient des pays étrangers seraient assujetties à passer par Lyon. Il paraît même, par les énonciations qu’on trouve dans le préambule de quelques édits, que les droits avaient été perçus à son profit à différentes époques. Ces droits se levaient sous différents noms. L’on comptait la douane de Lyon, perçue sur tout ce qui passe par cette ville ou y est destiné ; la douane de Valence, qui se lève sur tout ce qui traverse cette partie du Dauphiné qui est entre l’Italie et les provinces de l’intérieur de la France ; et un autre droit établi à Lyon, qu’on nommait le tiers-sur-taux et quarantième.
En 1720, on sentit combien ces droits et l’espèce de monopole qu’on avait laissé usurper par la ville de Lyon nuisaient au commerce général du royaume et aux autres villes de manufactures. On s’occupa d’y remédier. Tous les droits sur les soies furent convertis en un seul droit de 20 sous par livre de soie étrangère ; et au lieu de faire payer ce droit à Lyon, les fermiers-généraux furent chargés de le percevoir à toutes les entrées du royaume. La ville de Lyon se vit avec peine privée de ce privilège. Sur ses instances et sur ses représentations, disant qu’elle avait contracté des dettes considérables hypothéquées sur ces droits, on eut la malheureuse condescendance de rendre, au mois de janvier 1722, un édit qui lui concéda pour quarante années, qui devaient finir en 1762, le droit sur les soies étrangères réduit à 14 sous par livre, et de plus un droit de 3 sous 6 deniers par livre sur les soies nationales.
En 1755, le Conseil fut frappé de l’inconvénient qui résultait de ce droit singulier qui établissait, en vertu d’une loi, un monopole aussi criant en faveur d’une seule ville contre tout le royaume, et sur une marchandise aussi précieuse pour les manufactures. L’établissement d’un droit sur les soies nationales ne parut pas moins absurde et moins préjudiciable dans les principes mêmes de ceux qui regardent les droits de traite comme utiles : principes selon lesquels la soie devrait être exempte de droits à double titre, soit qu’on la regardât comme le produit d’une culture et de l’industrie des sujets de Votre Majesté, soit qu’on l’envisageât comme la matière première d’une foule de manufactures. En conséquence, on fit un