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Supplément à l’Avis sur l’imposition de la taille de la généralité de Limoges
pour l’année 1769. (17 octobre 1768.)

Lorsque, suivant l’usage, nous avons envoyé au Conseil, au mois d’août dernier, notre Avis sur les impositions de l’année prochaine, et sollicité les bontés du roi en faveur de cette généralité, nous avons insisté principalement sur la surcharge dont cette province est accablée depuis longtemps, et dont nous avons donné des preuves démonstratives dans un Mémoire adressé au Conseil en 1768, sur la misère où la mauvaise récolte de 1767 avait réduit les habitants, redoublée encore par l’augmentation d’impositions survenue dans la même année ; enfin, sur la masse d’arrérages accumulés dans le recouvrement des impositions pendant le cours de la dernière guerre, arrérages qui sont à la fois la preuve et l’effet de la surcharge, et dont les contribuables ne peuvent espérer de se libérer qu’autant qu’ils éprouveront un soulagement effectif sur les impositions des années à venir.

Nous nous flattions alors, et nous annoncions dans notre Avis, que la récolte de l’année présente serait, sinon abondante, du moins assez bonne. Les récoltes d’été s’avançaient, et l’on n’avait point absolument à se plaindre de leur quantité. Les récoltes d’automne, qui font une très-grande partie de la richesse de la province, promettaient beaucoup ; enfin, peu de paroisses avaient essuyé des accidents particuliers assez considérables pour exiger de fortes diminutions.

Depuis cette époque les choses sont bien changées. Le jour même où nous faisions partir notre Avis, le 16 août, fut marqué par un orage accompagné de grêle et d’ouragan, qui se fit sentir dans une très-grande partie de la province, mais surtout dans l’Angoumois, où plusieurs paroisses ont perdu la plus grande partie de leurs vignes, et même quelques-unes une partie de leurs froments, qui n’étaient point encore serrés. Il est vrai que cet orage a fait plus de mal encore dans la partie de l’Angoumois qui dépend de la généralité de La Rochelle, que dans celle qui est comprise dans la généralités de Limoges.

Mais il s’en faut beaucoup que les pertes qu’il a occasionnées, et qui n’ont été que locales, approchent du mal qu’a causé la continuité des pluies, qui ne cessent de tomber depuis deux mois. Indépendamment des pertes occasionnées par les ravines et les inonda-