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seul fait de la suppression des douanes intérieures. Le quelque chose à faire nous paraît même immense sous ce rapport ; et, tout en convenant, d’une part, que le retour aux principes, au respect du droit naturel, serait une imprudence s’il s’opérait sans aucune transition, il n’y a pas de moyen de dissimuler, de l’autre, que le statu quo est profondément déplorable.

Il y a donc encore aujourd’hui, pour les cœurs honnêtes et les esprits sérieux, un bien grave sujet d’étude dans tout ce que Turgot a écrit sur la manière la plus avantageuse d’assurer les revenus de l’État, et de répartir sur la communauté entière le tribut qu’elle se doit à elle-même pour subvenir aux dépenses publiques. Malheureusement, comme on le verra, les circonstances n’ont pas permis à l’illustre philosophe de donner un complet développement à ses idées sur la matière, ou bien l’on a à regretter la perte d’une partie de ses savantes méditations. Ces circonstances sont un véritable malheur, car quel homme avait jamais été plus digne, par le talent et par le caractère, de parler de l’impôt, que le vertueux ministre dont l’infortuné Louis XVI disait : « Il n’y a que lui et moi qui aimions le peuple ? » (E. D.)




I. PLAN D’UN MÉMOIRE

SUR

LES IMPOSITIONS EN GÉNÉRAL, SUR L’IMPOSITION TERRITORIALE
EN PARTICULIER, ET SUR LE PROJET DU CADASTRE[1].


L’objet sur lequel M. le contrôleur-général a consulté les intendants est un des plus intéressants que l’on puisse examiner. Il

    égard. Conçoit-on une atteinte plus positive à la propriété foncière, que celle qui empêche le propriétaire du sol de l’exploiter ainsi qu’il lui convient ? Cependant, le fisc prohibe la culture du tabac en France, uniquement pour nous faire payer 4 francs le demi-kilogramme ce qui aurait une valeur courante de 80 centimes sans le monopole. Conçoit-on une atteinte plus positive encore à la propriété personnelle, au droit du travail, que les entraves mises à l’exercice de certaines professions, restées libres dans les pays étrangers sans nul inconvénient pour l’ordre social ? Et enfin, que ces conditions diverses de savoir scientifique ou littéraire imposées pour l’admission à certains emplois publics avec lesquels elles n’ont aucun rapport ? (E. D.)

  1. Voici à quelle occasion fut rédigé ce Mémoire, ou plutôt ce projet de Mémoi-