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LE CONTEUR BRETON

nuit dans la chambre du prince. Elle en parla a son père, dans la crainte qu’il n’y eût quelque chose entre eux. Ce vieux prince alors imagina de donner du vin soporifique au jeune prince avant qu’il n’allât se coucher ; et alors on laissa entrer dans sa chambre la gardeuse de volailles. Celle-ci alors se met à dire son Oremus : — Me voici venue, dit-elle, pour te voir ; j’ai usé, en te cherchant, mes deux paires de souliers en fer et ma paire de souliers en acier ; j’ai enlevé les taches de ta chemise, de cette chemise qui portait trois gouttes de mon sang et que personne, excepté moi, n’a pu détacher. — Le prince n’y prenait garde ; il était profondément endormi et ne l’entendait pas, non plus que ce qu’elle disait. Celle-ci alors se plaint de plus en plus fort ; c’était pitié de l’entendre. — Maintenant, dit-elle, tu fais la sourde oreille ; tu n’étais pas ainsi jadis quand tu te trouvais sous la peau d’une horrible bête. — Depuis le soir jusqu’au jour elle poussa des gémissements de cette sorte aux oreilles du prince qui était dans l’impossibilité de l’entendre et qui ne prenait pas garde à elle, quoiqu’elle le secouât fortement.

À la pointe du jour on la fit retourner à ses poules, et elle alors de mettre sa poulette d’argent parmi les autres poules. Quand la princesse passa par la cour, elle l’aperçut et désira l’avoir pour la mettre avec son coq d’or. La gardeuse de volailles la lui vendit aussi pour neuf mille écus, à condition de passer une nuit dans la chambre du jeune