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LE CONTEUR BRETON

dit une jeune fille ; je l’ai lavée, et même bien lavée, mais elle n’est pas détachée, et j’ai eu beau la frotter, la battre, la savonner, je n’ai pu, ni moi ni les autres, venir à bout d’enlever ces trois gouttes de sang.

Marie entend ce que dit cette femme ; le sang lui bouillonne dans les veines. Elle s’approche des femmes et sent que sa troisième paire de souliers est percée. Quand elle arriva auprès des blanchisseuses, elle dit : — Donnez-moi, je vous prie, cette chemise du prince dont vous parliez tout-à-l’heure ; je voudrais voir aussi si je ne pourrai pas la détacher. — Vous, sale souillon, lui dit une d’elles, éloignez-vous d’ici, vous sentez mauvais.

Qu’est-ce, dit la maîtresse, quand elle entendit cela ? Quoi ! cette femme vous parle poliment et vous lui répondez durement. Tenez, dit-elle, en lui donnant un soufflet de sa main osseuse ; une autre fois vous serez plus réservée ; prenez garde, si vous voulez. La maîtresse prit alors la chemise et la remit à cette jeune femme.

Aussitôt que Marie l’eut trempée dans l’eau et un peu frottée, les trois gouttes de sang disparurent. — De quel pays êtes-vous, lui dit alors la maîtresse ? — Je ne suis pas d’ici, ni même de près d’ici ; je suis née dans la Basse-Bretagne qui est à environ trois cents lieues de cette contrée, du côté du midi ; et comme je viens de si loin, vous pouvez croire que je suis bien fatiguée. Aussi m’étais-je arrêtée ici pour me reposer un peu,